L’écologie n’est pas un consensus. François Gemenne.

François Gemenne, L’écologie n’est pas un consensus. Dépasser l’indignation
Éditions Fayard, 2023
https://www.fayard.fr/

Le livre

La démocratie représentative est aujourd’hui bien incapable de mener des politiques adaptées aux enjeux climatiques et de biodiversité. Pourquoi ? Parce que, par nature, ces politiques supposent des changements importants dans nos modes de vie, parce qu’elles ne peuvent pas faire consensus et parce qu’elles produiront des tensions dans la société. De ce fait, l’écologie ne rassemble pas, elle divise. Si le changement doit venir, il sera le fait de minorités agissantes et non pas de majorités conscientisées. En quelques mots, c’est la thèse de ce petit livre.

La lutte contre le changement climatique suppose une coordination internationale, des changements structurels de l’économie et des évolutions irréversibles de nos modes de vie. Du côté des États ou des classes favorisées, les principaux responsables n’étant pas les premières victimes du réchauffement, chacun tente d’en faire le moins possible. Les lobbies conservateurs sont puissants. Du côté des électeurs, la préoccupation envers le pouvoir d’achat contredit l’impératif du changement, le court terme s’impose au long terme, l’individu prend le pas sur le collectif.

Dans la bataille de l’opinion, le catastrophisme, la délation des comportements irresponsables ou la fixation d’objectifs que l’on sait déjà irréalistes (limiter le réchauffement à 1,5°C) sont des messages contre-productifs. La conscientisation a ses limites : les efforts individuels ne règleront au mieux que 20 % du problème. C’est donc l’activisme écologique (qui va probablement se radicaliser) qui constitue la principale voie pour obtenir des réponses fermes des responsables politiques. Des minorités déterminées peuvent trouver des alliés, par exemple dans certaines entreprises, où les changements de mentalités sont rapides. Mais pour bénéficier d’un appui suffisant dans l’opinion publique, ces groupes actifs doivent apparaître comme suffisamment proches des gens et non pas comme des intégristes donneurs de leçons.

Autre espoir : la démocratie délibérative. L’expérience française de la Convention citoyenne pour le climat (un échec au niveau du résultat, une réussite éclatante au niveau du processus) montre que des consensus forts peuvent être trouvés, y compris par des citoyens qui ne sont pas tous écologistes.

Notre lecture

Une analyse très accessible et sans concession, livrée par un membre du GIEC. On reste cependant sur sa faim en ce qui concerne les propositions : de qui seraient composées ces minorités agissantes qui peuvent faire changer les choses ? Comment la démocratie délibérative peut-elle gagner en efficacité ?

L’auteur

François Gemenne est politologue, enseignant à l’Institut d’études politiques de Paris et à l’Université de Liège. Co-auteur du sixième rapport du GIEC, il est spécialiste des migrations environnementales et des politiques d’adaptation au changement climatique.

Note rédigée par Pierre-Yves Guihéneuf
Décembre 2023.

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