Les institutions invisibles

Par Pierre Rosanvallon, 316 p, 2024, éditions du Seuil.
https://www.seuil.com/ouvrage/les-institutions-invisibles-pierre-rosanvallon/9782021544350

Le livre

Autorité, confiance, légitimité. Le sentiment spontané de leur centralité dans le fonctionnement des sociétés voisine avec le flou de leur caractérisation. En retraçant l’histoire longue de leur appréhension, ce livre propose de les comprendre comme des institutions invisibles. Institutions, car elles ont une fonction de production du commun et
d’inscription dans la durée des rapports économiques, sociaux et politiques. Mais invisibles, car elles ne sont pas définies par des règles et des statuts, ni dotées d’une capacité de contrainte. Elles sont en effet constituées par la nature et la qualité des relations entre individus, ou entre individus et organisations. Autorité, confiance et légitimité s’entrelacent sur ce mode pour faire système.

Cette conceptualisation permet d’élargir le cadre d’analyse des sociétés contemporaines tout en l’inscrivant dans une histoire comparative renouvelée. Elle ouvre simultanément des perspectives pour agir en vue de surmonter la perplexité des intelligences et l’assèchement des imaginations qui nourrissent aujourd’hui le fatalisme résigné à l’ombre
duquel prospèrent les mirages populistes.

Notre lecture

La confiance, l’autorité et la légitimité ne se décrètent pas. Ces éléments du pouvoir se gagnent et se construisent par les citoyens eux-mêmes. Cet ouvrage est une sorte de diagnostic sur notre démocratie et propose des pistes pour l’améliorer, via ces trois institutions invisibles que sont la confiance, la légitimité et l’autorité, qu’il faut reconnaître et revitaliser. Selon l’historien Pierre Rosanvallon, on ne peut comprendre le fonctionnement des sociétés que si l’on prend en compte ces éléments.

La confiance

Elle se gagne par des actes. Les personnes font confiance car elles disposent d’informations qui leur permettent de faire confiance. La confiance se construit avec le temps et elle a besoin de garants. Ainsi, notre démocratie manquerait, selon l’auteur, de contrôle démocratique pour assoir justement la confiance.

La légitimité

Elle vient aussi du peuple : si un pouvoir n’est pas reconnu comme légitime (à noter une  différence entre légalité et légitimité), la société peut se rebeller.

L’autorité

Il s’agit là de distinguer l’autorité pouvoir et l’autorité direction. L’autorité doit indiquer la bonne direction, elle fait référence, elle permet de se projeter dans un collectif et elle fait le lien entre l’individu et le citoyen. C’est la différence entre l’instituteur qui tape sur les doigts et celui qui donne sens, qui enthousiasme.

Le message essentiel que l’on peut retenir est le suivant : une société ne peut pas être gouvernée uniquement « par le haut ». La démocratie ne peut pas être résumée par le vote. Il s’agit de développer ces trois fonctions démocratiques et de les garantir, notamment à travers des institutions de contrôle, qui pourraient être des institutions citoyennes, de type conventions citoyennes. Piste à creuser !

L’auteur

Pierre Rosanvallon est professeur émérite au Collège de France. De L’Âge de l’autogestion (1976) aux Épreuves de la vie (2021), il est l’auteur de nombreux ouvrages qui occupent une place majeure dans la théorie politique contemporaine, la réflexion sur la démocratie et la question sociale. Il a notamment fondé la République des idées et la Vie des idées.

Note rédigée par Sylvie Barnezet
Octobre 2024.